C’est un fait malheureusement incontestable : la ville de Rio de Janeiro ne possède plus aucune plage naturelle, tant pour ce qui concerne l’intérieur de la baie que la façade océanique, comme on peut le voir sur cette carte dressée par Verena Andreatta.

La plus fameuse d’entre toutes, celle de Copacabana, a fait l’objet de nombreux aménagements depuis la fin du XIXe siècle, lorsque les dirigeants de la Companhia Ferro-Carril do Jardim Botânico (qui avait ouvert le premier tunnel entre le ville historique et ce quartier de pêcheurs), faisaient valoir que « les deux plages de Copacabana et Arpoador sont dotées d’un climat magnifique et salubre, elles sont balayées constamment par les brises fraîches de l’Océan, qui en font deux véritables sanatoriums et dans une ville décimée périodiquement par des épidémies, elles seront rapidement recherchées par la population comme les villes balnéaires d’Europe ».
Au début du XXe siècle (1912), a lieu la construction de l’avenida Atlântica, au début une simple rue de 6 mètres de large en bord de plage.

En 1919, elle atteint 19 mètres de large pour laisser place au trafic automobile naissant, comme le montrent ces photos d’Augusto Malta


Mais le plus spectaculaire des aménagements est sans conteste celui qui prend place entre 1969 et 1971, sous la mandature municipale de Negrão de Lima. Les enjeux sont multiples : élargir l’avenue pour répondre à l’explosion du trafic automobile ; repousser le trait de côte pour lutter contre les effets du ressac ; élargir la plage pour offrir un espace de loisir balnéaire encore plus vaste ; et finalement installer un système de canalisation centralisée des égouts pour un quartier très densément peuplé.
Le résultat est assez fascinant et configure la forme de Copacabana telle que nous la connaissons aujourd’hui. L’urbaniste et architecte Lúcio Costa est à l’origine du projet, confié à l’ingénieur Raimundo de Paula Soares.

Entre les deux pistes a été installé l’Interceptor Oceânico da Zona Sul, une immense canalisation pour la collecte des égouts du quartier :
Le sable nécessaire à l’extension de la plage provient pour l’essentiel de la baie de Guanabara : il a été conduit par un ensemble de canalisations spécialement construites à cet effet (par lesquelles ont transité 1.200.000 m3) et par bateaux (2.000.000 m3). La carte et les photos ci-dessous font partie d’un dossier spécial de la revue Cruzeiro (à noter que la Radio Télévision Portugaise a réalisé à cette occasion un reportage sur ce déplacement spectaculaire, que l’on peut découvrir ici : https://arquivos.rtp.pt/conteudos/alargamento-da-praia-de-copacabana/)



La nouvelle plage a ainsi pris forme peu à peu, repoussant le trait de côte un peu plus au large :
Le traitement paysagistique a été confié à Roberto Burle Marx (qui a travaillé avec Lúcio Costa et Oscar Niemeyer) :
En attendant, d’autres projets avaient été soumis, à l’exemple de celui-ci, qui aurait encore donné un autre aspect au front de mer :
Et c’est finalement en 1988 que les premiers cocotiers seront plantés – comme s’il s’agissait de tropicaliser une plage sous les tropiques, plage entièrement repensée depuis sa transformation en espace balnéaire (voir notre post : Copa Cabana 1912).